Carcassonne: mon premier « EuroGa fly-in »

Il y a maintenant deux ans, je suis tombé par le hasard de mes navigations, sur le site anglophone d’un pilote basé à Shoreham, Sussex, au Sud du Royaume-Uni, qui sans artifice inutile, partageait par ce moyen, les récits de voyages (trip reports) effectués depuis 2002 dans toute l’Europe. A côté de ces récits de vol, des dizaines d’articles extrêmement détaillés étaient mis à la disposition du quidam, intéressé par des questions mécaniques, électroniques, informatiques, législatives, opérationnelles, des projets entamés, d’autres réalisés, d’autres en cours. La qualité exceptionnelle de cette source, et la quantité énorme d’informations à disposition, me donna à l’époque, le sentiment d’avoir identifié un ainé et une route à suivre, pour continuer à développer mon savoir-faire et mes compétences aéronautiques. Nul doute que ce pilote, Peter, constituait une référence, qui de surcroit faisait un effort évident de pédagogie et de partage, pour mettre à la portée des plus jeunes, ses connaissances et son expérience méthodiquement accumulés depuis plus de 10 ans. Il faudrait ajouter que ce site démarre en 2002, peu après l’initiation aéronautique de l’auteur. Le PPL à peine en poche, celui-ci n’a pas hésité à se porter acquéreur d’un magnifique Socata TB20 tout juste sorti d’usine, avion de hautes performances pour qui vient à peine de quitter l’école.
Soucieux de donner à ses récits un caractère exhaustif, chaque article commence invariablement avec la présentation de son pilote, de son expérience croissante, et de son fidèle destrier, dont les évolutions technologiques n’échappent pas à l’oeil averti du passionné.

L’incipit présente ainsi l’aéronef, l’un des derniers TB20 produits, son cockpit, dont on peut voir qu’il représente la quintessence technologique de la fin des années 90, et l’indispensable système à oxygène, qui permet d’accroître considérablement le champ opérationnel de la machine. Voilà pour les outils.
Concernant l’avion, chacun des tâtonnements, chacune des avancées, chaque difficulté rencontrée, chaque panne, ont été traités par leur auteur, avec un sens du détail, une expertise technique et règlementaire, une honnêteté et une transparence, qui disons-le, force l’admiration des lecteurs. C’est ainsi que j’ai pu découvrir comment un homme déterminé, au terme d’une due diligence complète, pouvait envoyer son moteur aux Etats-Unis pour sa révision générale. Comment le système satellitaire Thuraya pouvait être exploité, bidouille aidant, pour obtenir une connexion de données en vol à moindre coût. Comment s’installe un TCAS, et à cette occasion comme en d’autres, comment le travail d’un atelier multi-certifié peut être remis en doute, car très loin de la perfection alléguée.
C’est sans doute le deuxième enseignement majeur dont j’ai pu bénéficier – après l’audace d’entreprendre des vols conséquents : le pilote – propriétaire est en droit et en devoir d’acquérir une expertise technique et règlementaire, lui permettant de porter un regard critique sur le travail d’un atelier. « They have you over the barrel ! » peut-on lire régulièrement… Car après 15 ans sur la scène aéronautique internationale (son influence dépasse définitivement les frontières !), Peter s’est manifestement taillé une certaine place et une certaine audience… Mais aussi quelques inimitiés ! Peu importe, puisqu’il a mené le raisonnement jusqu’à son terme: son avion après quelques années de vol, est passé du registre anglais (G-reg) au registre américain (N-reg), autorisant une plus grande souplesse dans les modalités d’entretien, notamment en se passant des ateliers agréés. Peter effectue ainsi lui-même ses visites, sous la supervision et avec l’aide d’un mécano indépendant. En fait, Peter connait probablement mieux son avion que quiconque en Europe… Du moins, est-ce l’idée que je m’en suis fait.

Mais Peter ne s’est pas arrêté là. En effet, à peu près à la même époque, je devais découvrir l’existence d’un forum ouvert, traitant d’aviation générale, et appelé EuroGAIl m’a fallu quelques temps avant de faire le lien entre ce forum, et son créateur: l’inépuisable pilote du TB20 avait encore frappé… Dépassant alors la dimension technique, et le récit de ses exploits accomplis à travers l’Europe, Peter s’est donc attelé à la création d’une communauté aéronautique Européenne.  EuroGA existe maintenant depuis 3 ans, et compte plusieurs milliers de lecteurs chaque jour. Comment est-ce possible ? Et bien, parce que plus encore que les forums déjà existant, EuroGA se distingue par la bonne humeur des échanges, l’ouverture à tous les acteurs de la scène aéronautique, une qualité d’information exceptionnelle, assurée entres autres par la présence de professionnels (pilotes, mécaniciens, ingénieurs, informaticiens, contrôleurs aériens…), et une indépendance totale, chère à son créateur.

EuroGa est alors devenu une nouvelle mine d’information, consultée quotidiennement – je veux dire pluri-quotidiennement – abordant tous types de sujets, de la problématique technique, aux voyages longue distance, du Piper Cub au Cessna Citation, des questions de pilotage, aux questions psychologiques (comment dormez-vous la nuit précédent un vol ?), des sujets mécaniques aux aspects règlementaires… Nulle part ailleurs, une si large quantité d’information, avec un tel niveau de qualité. Nulle part ailleurs, une entraide aussi chaleureuse et spontanée. Chaque problématique que je rencontre, je n’hésite plus à l’exposer dans cet espace… C’est dire s’il est devenu précieux !

Et puis… Et puis au fil des posts, de nouvelles individualités se sont distinguées. On finit par connaitre un peu leur profil, leur secteur d’activité privilégié, leur style de réponse. Et ainsi, devient-on virtuellement familier, avec Pilot_DAR (le pilote d’essai en vol canadien), what_next (le pilote d’affaire allemand sur C525), JasonC (le banquier anglais volant en Cessna Mustang), Emir (l’informaticien croate au DA42), Jesse (spécialiste hollandais de l’avionique), Michael (inspecteur FAA américain installé à Paris)… Et j’en oublie, des tas, tant les intervenants sont nombreux et remarquables.
J’en oublie un au moins, c’est le protéiforme et génial Achimha, ingénieur-informaticien, pilote d’un C182TR, ayant rallié au moins deux fois l’Egypte à bord de son aéronef, et qui a développé et mis à disposition des usagers du forum, l’exceptionnel logiciel de routing et de dépôt de plan de vol, l’Autorouter. L’élaboration et la complexité de cet outil, proposé gratuitement alors même qu’il est supérieur à tout ce que la concurrence commerciale propose, mériterait en soi une plus longue description. Ce « cadeau » en quelques sortes, illustre le fonctionnement de partage de la communauté.

Tous ces pseudos, tous ces avions vus en photos, ont fini par constituer un monde imaginaire très riche, faits de personnages fantasmés et d’histoires héroïques, qui au fil du temps devenaient de plus en plus difficiles à projeter dans le réel. Pourtant, une inflexion de cet espace entre l’imaginaire et le réel devait bientôt se produire, et un jour le N113AC si longtemps reproduit par l’écran de mon ordinateur, devait prendre une consistance nouvelle.

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L’irréfutable preuve de l’existence du N113AC

C’est à l’occasion d’un vol à Carcassonne, en compagnie d’Alboule (que je n’ai pas encore présenté, mais qui se trouve être lui aussi, membre d’EuroGA, fraîchement rencontré dans la vraie vie… et basé juste à côté d’Aix, à Salon !), que quelques uns des personnages devaient s’incarner en chair et en os.

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Comment reconnaître les membres d’EuroGa dans une cité médiévale ?

C’est d’abord deux belges, Jean (médecin) et Denis (cameraman pour la RTBF), venus à bord de leur DA40, que nous avons essayé de retrouver dans la vieille ville, après leur avoir donné un point de rendez-vous, et notre signalement. Un jeu de piste complètement improbable démarrait ainsi, qui s’est terminé dans un café tout proche, nous quatre parfaitement inconnus, et pourtant rendus si proches et familiers, par l’aviation, et par la communauté à laquelle nous appartenons.

Quelques heures plus tard, l’éphémère rencontre se poursuivit autour d’un casse-croute, mais pour Alboule et moi, la rencontre devait bientôt se terminer, notre retour à Aix étant prévu pour le soir même. C’est depuis cette table que mon plan de vol IFR a été déposé (via l’Autorouter évidemment) en moins de 5 minutes. Gentiment déposés à l’aéroport par nos amis belges, nous avons préparé l’avion, et décollé à l’aide d’une rafale de vent qui nous projeta dans les airs.

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Tchao les copains !

Le retour fut agréable et assez direct, quoique transitoirement en IMC à 0°C… mais de l’air chaud restait abondamment disponible en dessous.

Le mot de la fin ? Une journée magique. Qui nous confirme, si besoin était, à quel point la passion de l’aviation peut unir et rapprocher ceux qui la pratiquent. Une envie ? Retourner au prochain fly-in qui se présente !

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